L’ensemble de ce mémoire traite de la situation du personnel des Postes du Rhône et de son évolution durant le Troisième République. Dans un premier temps, l’analyse porte sur les nombreux changements qui surviennent dans le service postal au cours de cette période et des répercussions qu’ils ont eu sur les employés de ce secteur. Le développement des réseaux, l’accroissement du trafic et le rattachement des services télégraphiques et téléphoniques provoquant en effet de grands bouleversements dans le fonctionnement et la gestion du personnel.
Cette diversification entraîne une élévation sensible des recrutements dont les critères semblent de plus en plus sélectifs. Bien que ces emplois restent accessibles à un grand nombre de candidats, la persistance des recommandations politiques et les emplois réservés prioritairement aux anciens militaires, rendent cependant les choix parfois peu équitables.
Etre engagé par l’Etat offre des avantages non négligeables, comme le droit à la retraite et la stabilité de l’emploi, mais ils sont souvent aux pris de conditions de travail très pénibles. La fatigue, le stress, la maladie sont le lot quotidien de ces postiers dont la situation a tendance à se détériorer au fil des années.
Dans un second temps, les recherches se sont dirigées vers les questions concernant la mobilité de ces agents. L’étude leurs parcours à la fois géographique et professionnel ont permis d’apporter certains éléments de réponse.
Si les départements d’origine des postiers sont sensiblement les mêmes que ceux de la population lyonnaise, il semble en revanche qu’une majorité d’entre eux soient issue de milieux modestes, le plus souvent de la paysannerie. Ils voient dans le service public le moyen de changer de vie et de s’ouvrir de nouvelles perspectives d’avenir.
La plupart parviennent à améliorer leur sort au cours de leur carrière dans les Postes, mais les chances de promotion sociale ne sont pas identiques pour tous. Ainsi, les femmes ne bénéficient pas du même traitement que leurs homologues masculins et ne peuvent quasiment pas accéder à des fonctions de haute responsabilité. De même, un certain nombre de facteurs ne disposent pas d’une rémunération suffisante pour faire vivre leur famille et sont en proie à la misère. Ce phénomène est accentué par le fait que l’Etat, soucieux de faire des économies, tend à limiter au maximum les avancements qui deviennent de plus en plus difficiles à obtenir.
Travailler dans le secteur postal a également une grande incidence sur la vie familiale des individus dont les longues et pénibles journées ne favorisent pas les unions conjugales. Le célibat atteint de forte proportion notamment parmi le personnel féminin pour qui un mari et des enfants sont difficilement conciliables avec leur choix professionnel. Les personnes mariées ont quant à elles tendance à limiter le nombre des naissances dans l’objectif de conserver leur niveau de vie et de favoriser l’ascension sociale des générations suivantes.
Enfin, le dernier thème abordé dans cette étude traite des grands mouvements revendicatifs qui touchent le secteur postal au début du XXe siècle.
Même si les effectifs augmentent considérablement, le nombre des postiers reste toujours insuffisant et les conditions de travail se détériorent. Pour faire face à ces difficultés, des mouvements associatifs de prévoyance sont mis en place afin de venir en aide aux agents les plus démunis. Parallèlement, les signes de mécontentement se multiplient et des actions isolées se mettent à éclater. Malgré le refus persistant de l’Etat d’accorder le droit de grève aux fonctionnaires, de nombreux groupes syndicaux se créent et s’organisent peu à peu pour obtenir gain de cause.
La division catégorielle qui règne dans les Postes limite cependant les possibilités de pressions sur le pouvoir. Les mouvements de grève de 1906 à 1909, s’ils permettent quelques améliorations, souffrent du manque de cohésion et n’aboutissent pas aux résultats espérés. Ils marquent cependant le départ d’une lutte dont le dénouement nécessite encore quelques années d’efforts.